Inutile de dire que des exposés d’Ivan si construits, il ne me reste que des fragments… Pourtant sur le moment, il me semblait que je comprenais tout et que je regardais avec plus d’acuité les traces laissées par les volcans. Je me souviens du mot neck (de l’anglais « cou »), pour désigner les buttes, et les pitons que nous rencontrions partout. J’ai compris que ce qui comptait dans le volcanisme, c’était le travail de l’érosion qui décapait les roches et ne laissait subsister que le « cou » des basaltes après disparition de la formation préexistante.

Je me souviens de l’atmosphère « chaude et humide » de la région du Puy-en-Velay il y a 15 millions d’années quand un lac recouvrait la surface de la zone. Les laves visqueuses se refroidissaient rapidement au contact de l’eau, expliquait Yvan.
Je me souviens des argiles du ravin de Corboeurf (près de Rosières) beiges et vertes, formées à partir des sédiments du lac…

avec des pentes délicatement striées de bleu.

Je me souviens d’un autre lieu où les explosions provenant de la rencontre entre le magma brûlant et la nappe phréatique ont façonné un cratère de grande dimension, aujourd’hui occupé par le lac du Bouchet. Les débris étant projetés très loin, il ne restait autour du lac qu’un mince rempart de tufs et de ponces. Je me souviens du plaisir à regarder cette eau endormie, pendant qu’était évoquée la formidable énergie des « volcans explosifs à cratères ».

Je me souviens des eaux de la cascade de la Beaume (ce qui signifie grotte dans tout le Sud de la France) non loin de Solignac-sur-Loire, trois chutes distinctes tombant en gerbes d’écume sur des coulées de basalte très noires.

Les collisions entre les empâtements noirs de la roche et les éclaboussures blanches de l’eau faisaient penser à des calligraphies inversées d’une extraordinaire beauté.

Je me souviens du dyke d’Arlempdes. Je revois le village fortifié sur son piton entouré par un méandre de la Loire. On voyait à la fois la cheminée d’un volcan (le neck) et les traces laissées par le remplissage de fissures latérales (dyke). Sur le moment, j’ai pensé « Chic ! Deux mots pour placer la lettre K, s’il m’arrive de jouer à nouveau au scrabble » et je n’ai pas vraiment cherché à comprendre les explications d’Ivan.

Je me souviens des orgues basaltiques de Chilhac avec leur drôle de capuchon de roches enchevêtrées supportant des colonnes prismatiques fascinantes. J’ai mal compris les raisons de leur allure géométrique ?


Ces promenades où Ivan évoquait les volcans se passaient dans la lumière du printemps. Tout était doux autour de nous, les couleurs des forêts, les petites chapelles romanes perchées sur les sommets. A Rochegude, au-dessus de Monistrol-d’Allier, le chien de la maison n’aboyait pas et nous regardait tranquillement passer.

A Chanteuges, les roses semblaient inséparables du vieux mur de pierres volcaniques du prieuré.

Depuis les terrasses, on voyait un village de la vallée. La chaleur faisait monter une vapeur au milieu des collines bleues. Le village aurait pu être inventé par un esprit nostalgique des années où Mitterrand faisait campagne en célébrant la « Force tranquille » de sa politique. L’affiche de la campagne électorale montrait derrière lui un de ces villages du centre de la France.

Puis c’était déjà la fin d’après-midi et le ciel commençait à se charger de nuages. Il restait encore à voir une surprise. Ivan nous a emmenés à la Pinatelle du zouave (près du Puy en direction de Loudes) voir la les pins de boulange. Pour alimenter commodément les fours à pain des alentours, les pins de toute une forêt étaient étêtés, puis on les taillait au niveau des branches horizontales, ce qui donnait des formes noueuses, tordues, apparentées aux effets obtenus par la taille des bonsaïs.


Beaucoup d’arbres en poussant prenaient l’allure de chandeliers :

Ce mode de taille s’était développé entre 1800 et 1950 environ, puis le fuel a remplacé le bois et la plupart des pins ont recommencé à pousser vers le ciel. Le département de la Haute-Loire, qui a racheté le site en 1996, a entrepris de replanter des pins sylvestres sur une parcelle et d’y appliquer les techniques anciennes de taille.

Nous revenons au Moulin de Barrette (non loin de Blavozy) transformé en hôtel. A côté du corps de logis, triplement étoilé, des gites plus modestes permettent de se loger à un tarif raisonnable et de jouir du grand parc de 8 hectares. Lors de notre visite, le fils, accidenté, était remplacé par sa mère déjà âgée, mère courage accueillante


Le Velay est particulièrement délicieux sous le soleil du printemps ; pendant ces quelques jours, la région donnait l’impression qu’y subsistait un besoin de vivre dans un ici paisible, aux marges de la société de surconsommation.
J’aime beaucoup ces pentes striées de bleu, ciels et nuages emprisonnés au sol sous un voile transparent…un paysage surréaliste!
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Les couleurs tendres des argiles du Puy-en-Velay m’ont d’autant plus frappée que j’ai arpenté souvent le Lubéron. Entre Roussillon et Rustrel, on peut voir des collines d’ocre qui vont du jaune pâle au rouge brun. Dans le Massif Central, j’ai découvert la beauté de ces argiles moins éclatantes, mais qui changent sans cesse avec la lumière !
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