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Je m’étais promis de compléter nos balades sur le boulevard Vincent Auriol par un billet-promenade sur quelques fresques situées entre cet axe et sa parallèle du boulevard Masséna.
Dans le 13e, comme on sait, la pratique des fresques murales n’a rien à voir avec les pratiques clandestines et éphémères des graffeurs, qui sont d’ailleurs parfois condamnés pour dégradation de l’espace public. L’art des fresquistes est institutionnalisé : il s’affiche à la demande et grâce aux financements de la mairie.
Le seul raté dont j’ai eu connaissance (Le Monde 25 mai 2019) est venu de l’architecte Gilles Béguin et de la désigner Isabelle Jégo, chargés de la réhabilitation de cinq barres de logements sociaux à l’îlot Say (du nom de l’ancienne raffinerie de sucre qui était installée là jusqu’à la désindustrialisation des années 60). En 2019, furieux d’imaginer leur « œuvre » dénaturée par une fresque, Gilles Béguin et Isabelle Jégo ont obtenu du tribunal l’interdiction de toute intervention de street art sur les bâtiments, à moins d’un accord préalable écrit de leur part.

Ce qui est à la fois drôle et triste, c’est que rien n’est plus morne que les blocs de béton du duo, supposés évoquer les carrés de sucre de la raffinerie Say. Ainsi, ce lieu sans qualité enferme la non-trace d’un art coloré et festif refusé par un duo vaniteux.
Les grandes fresques du 13e constituent un art muséifié. A Paris, le musée ART42 leur est d’ores et déjà entièrement consacré et les galeries ne manquent pas, à commencer par la galerie Itinerrance de Mehdi Ben Cheikh (qui est derrière ce projet de street art du 13e). La galerie est installée rue René Goscinny. Cet art officiel – ce qui n’a rien de péjoratif sous ma plume – tourne le dos à l’art tout aussi officiel des FRAC, (Fonds régionaux d’art contemporain ). Autant les FRAC ont du mal à rencontrer l’adhésion du public, autant Mehdi Ben Cheikh et le maire du 13ème ont trouvé la formule d’une expression monumentale qui plaît à la majorité des habitants et des touristes.

Repartons du boulevard, Vincent Auriol à l’angle de la rue Jeanne d’Arc. La grande fresque d’Obey (Shepard) Revolution 2 a les couleurs tranchées de l’agit prop, Le dessin simplifié cherche l’efficacité et il est impossible de ne pas se laisser happer par le regard de l’héroïne. Son visage s’inscrit immédiatement dans la mémoire comme le poster de Barack Obama qui a rendu Obey célèbre, comme la Marianne, elle aussi aux couleurs du drapeau français, qui pleurait récemment des larmes de sang avec les victimes de la pandémie.

Attirantes, en rivalité avec la publicité, jouant sur ce qui nous plait dans la société qu’elles dénoncent les images d’Obey se veulent des actes politiques qui font réfléchir.
Si l’on continue la rue Jeanne d’Arc vers l’église, on tombe sur une fresque de Logan Hicks. Très différente des autres, plus petite aussi, elle tient du dessin d’architecte, de la photo de nuit. J’aime bien cette évocation de l’atmosphère miroitante et pressée de la grande ville.

Si on tourne à droite, on se perd dans les petites rues. La ville est tranquille, les thèmes des fresques, assez sages (mère à l’enfant, grands hommes, motifs décoratifs) provoquent moins de désir, et de joie… qu’on en éprouve lorsqu’on remonte le boulevard Vincent Auriol.
Je crois que la fresque la plus ancienne du quartier se trouve rue Clisson. C’est un trompe-l’œil (tout près de la rue J.S Bach) qui représente l’artiste Fabio Reti peignant un portrait géant du compositeur d’après la reproduction d’un portrait en médaillon.

Au bout de la rue Jean-Sébastien Bach, deux pans de bleus sur un mur blanc. Qui est le concepteur ? Je ne sais pas

Près de la Rue Lahire, un plan du quartier, encadré par des portraits de Jeanne et de ses compagnons, peu inspiré. Je saute quelques rues pour me retrouver au croisement de la rue Jean Colly et de Château des rentiers devant un immense plan du métro du quartier en carrelage… changer les proportions suffit pour chasser la réalité et donner une allure de chasse au trésor

Arrêt au croisement de Tolbiac docteur Magnan et Choisy pour un nouveau visage réaliste et sentimental de C215, l’Age d’Or. Un gamin des favellas regarde l’agitation du carrefour.

Pour aujourd’hui, c’est tout, puisqu’il faut encore courir dans une des épiceries des frères Tang 48 avenue d’Ivry et 168 avenue de Choisy. Dans ce supermarché superlatif, je trouve tout ce dont je peux rêver comme épices et sauces asiatiques pour des cuisines thaïlandaises, chinoise, coréenne, japonaise… Je commence à apprivoiser les légumes, mais les poissons et les volailles m’impressionnent encore. Une autre fois peut-être.

ART42 (96, Boulevard Bessières, 75017 Paris – Métro Porte de Clichy (musée gratuit, malheureusement inaccessible en ces temps de COvid)
COSNARD Denis, http://lafabriquedeparis.blogspot.com/2012/11/la-raffinerie-say-ou-la-jamaique-paris.html
Belles photos ! Merci aux graffeurs qui nous offrent un peu de fantaisie. Je te recommande une promenade à Vitry sur Seine. Abondance de peintures très différentes de ces tableaux monumentaux
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