On se levait au petit matin. Mais très vite le plaisir de lire, ou d’écrire ou de faire quoi que ce soit s’évaporait et ne restait plus qu’une sensation de chaleur accablante.
Ceux qui pouvaient fermaient les volets, se douchaient et ne bougeaient plus avant le soir. Vers 6 heures, ils regardaient par la fenêtre, se disaient « Encore 5 heures avant la fraîcheur ». Ou bien, ils se réfugiaient dans les supermarchés réfrigérés pour faire d’interminables courses, allaient au cinéma, pataugeaient dans l’eau des fontaines et personne ne trouvait à redire aux jeunes gens en saharienne et en tongs, ou aux filles en jupes très courtes qui s’éclaboussaient en riant.
Même les touristes imaginaient des itinéraires de fontaines. En partant de la place de Concorde, ils offraient à leurs enfants une halte au Grand bassin des Tuileries, une autre
Ils marquaient une pause à la fontaine des Innocents, parce que c’est la plus élégante de Paris et qu’il fallait jeter un oeil sur les sculptures de Jean Goujon.
La vraie halte était pour la fontaine Stravinsky près de Beaubourg, qui est si joyeuse, si colorée qu’elle donne de l’énergie aux créatures les plus exténuées !

place Stravinsky. Fontaine des automates de Niki de Saint Phalle et Jean Tinguely
La fontaine des Innocents n’était pas d’un grand secours, mais personne ne vous interdirait de vous mouiller les pieds dans grand bassin du jardin du Luxembourg. Et on pouvait finir par l’apothéose de la fontaine des Quatre parties du Monde dessinée par Carpeaux pour les jardins de l’Observatoire.
Tout près, il y avait des cafés et on entendait les commandes :
– Tu devrais prendre un panaché
– Pour moi un coca bien glacé
Un peu plus tard, elle longeait le banc sur lequel les clochards viennent s’asseoir :
– Vous avez pas un euro ou un ticket restaurant ?
– Désolée pas de monnaie
– Elle pourrait sourire au moins la demoiselle. Ça coûte rien un sourire. Moi aussi j’ai été jeune comme vous.
Et elle aurait honte de ne même pas offrir une bouteille d’eau par une journée aussi étouffante.
Ça clignote dans les têtes, les signaux d’alerte du climat, cette chaleur dès le mois de juin, les orages violents, le contraste trop brutal de jours frais et de brusques remontées de température. Difficile de ne pas prendre au sérieux ceux qui demandent des mesures urgentes pour adapter les villes. Anne Hidalgo, régulièrement accusée de défendre le Paris des bobos, a le mérite de marteler : il y a trop de voitures dans Paris ».